Éditorial: Quand même les ordures sont plus présentes que les autorités en Haïti .
- 13/12/2025
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Il suffit de marcher quelques minutes dans les rues de Port-au-Prince pour comprendre l’ampleur de la tragédie : les ordures sont partout, omniprésentes, presque arrogantes dans la manière dont elles ont envahi les espaces publics. Elles sont plus visibles, plus constantes et plus « actives » que ceux qui devraient incarner l’État. Quand même les ordures sont plus présentes que les autorités en Haïti, cela signifie que le pays a franchi un seuil d’abandon qui ne devrait exister dans aucune nation qui se respecte.
À chaque intersection, chaque ravin, chaque marché, des montagnes d’ordures s’installent. Elles font partie du décor, façonnent le paysage urbain, imposent leur loi sur les trottoirs. Pendant ce temps, l’État, qui devrait organiser, superviser, nettoyer et protéger, brille par son absence. Les promesses se succèdent, les discours se succèdent, mais le citoyen ne voit aucun changement. La seule présence réelle dans les rues, jour après jour, n’est pas celle des autorités : c’est celle des ordures.
Cette insalubrité chronique n’est pas simplement un problème d’esthétique urbaine, c’est une crise sanitaire, sociale et psychologique. Elle expose les habitants au risque de maladies, renforce les inégalités (car ce sont les quartiers populaires qui souffrent le plus) et instille un profond sentiment de découragement. Comment croire en un avenir meilleur quand chaque trajet quotidien rappelle la négligence des autorités, quand chaque rue donne l’impression d’être laissée à l’abandon ? L’environnement dans lequel vivent les Haïtiens est devenu le miroir d’un État qui s’évapore un peu plus chaque jour.
Et pourtant, ce désastre n’est pas inévitable. Il est le résultat d’une gouvernance défaillante, d’un manque total de stratégie, d’un manque de volonté politique et d’un manque de responsabilité publique. Entre des autorités municipales paralysées, des institutions nationales inefficaces et une administration qui semble s’être retirée du terrain, personne n’assume la responsabilité de ce chaos. L’État devrait être le premier acteur à occuper l’espace public. Mais ce vide du pouvoir, ce silence institutionnel, laisse la place aux déchets.
L’indignation n’est plus un luxe, c’est une nécessité. Le peuple haïtien mérite mieux qu’une capitale transformée en dépotoir permanent. Il mérite un État qui se lève, assume ses responsabilités, protège et gère. Tant que les déchets continueront à occuper l’espace plus efficacement que les autorités elles-mêmes, Haïti restera prisonnier d’un cycle d’humiliation et de décadence.
Il est temps que les dirigeants cessent de détourner le regard. Il est temps que l’État fasse sentir sa présence autrement que par des discours. Il est temps que les autorités reprennent possession de l’espace public avant qu’il ne soit définitivement transformé en royaume des déchets. Haïti n’a plus besoin d’excuses. Il a besoin d’actions, maintenant.
Le Relais ....

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